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 A la guerre comme à la guerre 
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Buffalo Kasso
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Message A la guerre comme à la guerre
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La guerre: vous l'aimez, ou vous la quittez.

Deuxième topic anthologique après celui consacré au Western (un endroit d'ailleurs merveilleux que je ne peux vous recommander assez de visiter). (venez, pitié)
Cette fois, on tape dans le grand, beau et terrible: les films de guerre.
Sujet propice à toutes les approches envisageables et nous ayant donné pas mal de chefs d’œuvre.
Inutile de dire à quel point je compte sur CHARLTON pour alimenter régulièrement le thread. (je dis ça, c'est sans pression, hein :mrgreen: )

Sans plus attendre, lançons les hostilités avec...

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The Eagle Has Landed. John Sturges. 1976.

De son propre aveu, Michael Caine se réjouissait à l’époque de pouvoir bosser avec le réalisateur John Sturges.
Et franchement, on peut le comprendre : la carrière de Sturges est en effet tout à fait remarquable. Jugez plutôt : des westerns de légende (The Magnificent Seven, Gunfight At The O.K. Corral et le méconnu bien qu’excellent Last Train From Gun Hill), un film noir resté un modèle du genre (Bad Day At Black Rock), sans oublier le classique des classiques des films de guerre ayant sauvé plus d’un responsable de grille de chaîne télévisée en panne d’idées: La Grande Évasion.
Bref, on ne parle pas de n’importe qui.
Et pourtant, c’est un Sturges très fatigué qui arrive dans ce projet : démotivé, démobilisé, buvant plus que de raison, éreinté par les exigences du studio, il ne pense plus qu’à se retirer du business et se consacrer à son loisir préféré, la pêche au gros.
Entre deux prises, il s’en ouvre même à un Caine dépité : s’il est là, c’est uniquement pour la moolah, point final. D’ailleurs, le tournage fini, Sturges se barre et laisse des détails sans importance comme le montage ou la post-prod à des gens qui en ont quelque chose à foutre.
Selon Tom Mankiewicz, le script-writer du film (qu’on retrouve également au scénario d’une palanquée de James Bond), c’est la monteuse Anne V. Coates qui va prendre les choses en main et sauver le métrage. Là encore, on parle d’une grande pro : elle a en effet assuré le montage, entre autres, de bagatelles comme Elephant Man ou carrément Lawrence d’Arabie (pour lequel elle a d’ailleurs obtenu l’Oscar, excusez du peu). (bon, à côté de ça, elle a aussi bossé sur Congo). (faut bien vivre).
Ceci dit, si personne n’envisagera une seule seconde de contester l’importance de Coates dans le rendu final du film, on ne peut s’empêcher de se demander si la légitime déception qu’a ressenti Mankiewicz devant le désintérêt de Sturges n’a pas eu une certaine influence dans son avis sur le produit fini.
Car même si Sturges n’est plus la moitié du metteur en scène qu’il avait l’habitude d’être, cette moitié conserve suffisamment de métier pour tenir le spectateur en haleine sur son siège.
Pas vraiment en raison des scènes d’action, non : ça reste à tout prendre assez générique.
C’est plutôt au niveau de l’atmosphère que Sturges parvient encore à bricoler quelque chose de prenant : l’ambiance pue la défaite et l’opération entière n’est même pas envisagée comme pouvant changer quoi que ce soit au dénouement de la guerre (l’Allemagne nazie a perdu et ça, tous les « protagonistes » le savent très bien).
Chacun des acteurs du complot agit dès lors avec un agenda personnel qu’il espère faire avancer via sa participation à cette mission.
Il y a bien entendu le Colonel Steiner, joué par un Michael Caine impavide : bien qu’il soit clairement un homme de devoir, il ne voit la mission que comme une occasion de ramener son équipe de paras-commandos dans les bonnes grâces de l’état-major. Son tempérament de guerrier et de l’amour du travail bien fait prendra néanmoins le dessus et l’incitera à mener la mission à son terme, quitte à y rester.
Autre Colonel, autre vision du monde : Robert Duvall joue Radl (au look très clairement inspiré du véritable Colonel allemand Claus von Stauffenberg, incarné avec talent par Tom Cruise dans le remarquable Valkyrie de Singer, sur lequel on se penchera une prochaine fois), un haut gradé intelligent qui commence peu à peu à croire en la faisabilité du projet apparemment dément qu’on lui a demandé de gérer. La mission devient un défi personnel qu’il entend relever pour prouver que rien n’est impossible. Cependant, tout jusqu’au boutiste qu’il puisse être, il reste très lucide sur l’environnement mortifère dans lequel il se débat et il ne se fait aucune illusion sur l’identité de celui qui devra porter le chapeau en cas probable d’échec.
Enfin, le perso qui remporte toute l’attention du spectateur est sans conteste le fascinant Liam Devlin, joué avec une visible délectation par un Donald Sutherland absolument intenable. Irlandais membre de l’IRA aidant l’Allemagne nazie par haine pure envers l’empire britannique, Devlin est le « fou du roi » de l’équipe, élément en apparence insouciant et pourtant extrêmement efficace et rempli de ressources insoupçonnées (sa surprenante manière de gérer les chiens, son talent pour la boxe). Bref, un homme d’autant plus dangereux qu’il se tient volontairement sur la corde raide, entre amoralité joyeusement assumée et un idéal qu’il sait pertinemment inatteignable (qu’il s’agisse de son amour pour la jeune anglaise rencontrée pendant la mission ou de son dévouement envers sa patrie irlandaise).
Le spectateur se surprend à ne jamais vraiment vouloir la perte de Devlin, ce qui n’est pas le moindre tour de force d’un film où nous suivons, pour mémoire, les efforts d’un groupe de militaires de l’Allemagne nazie cherchant à kidnapper Churchill.
Vous en voulez encore ? Cela tombe bien, le casting nous réserve quelques autres pépites.
Exemple : Donald Pleasence qui profite à fond de ses trois petites minutes de présence à l’écran pour nous balancer un Himmler suintant le malaise et troublant de ressemblance physique.
Exemple² : Larry Hagman (hé ouais, J.R. de Dallas en personne) qui nous régale dans le rôle d’un Colonel américain absolument inepte que cela soit derrière un bureau ou sur le terrain.
Exemple³ : Treat Williams qui… est là.

Bref : ça n’est ni le meilleur Sturges, ni le meilleur Caine, ni le meilleur film de guerre que vous aurez l’occasion de voir.
Mais vous ne passerez pas un mauvais moment.


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Bombarder Washington à l'aide de zeppelins manoeuvrés par des singes génétiquement modifiés? Mais bien entendu. A vos ordres.

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Jeu Avr 08, 2021 11:50 am
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Inscription: Sam Juin 03, 2006 9:41 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Un classique, au sein d'un genre qui propose autant de visions macro que micro de la WWII. Avec L'Aigle s'est envolé, Les 12 salopards, Les canons de Navarone ou encore De l'or pour les braves...ces bons films cultes qui se focalisent sur une mission en particulier à base de soldats nerveux et charismatiques qu'ils soient alliés ou de l'axe d'ailleurs. Toujours un plaisir de les redécouvrir, pour ces vieilles bobines qui y trainent en effet, les rythmes percutant et des scènes mémorables. Il y a encore certainement beaucoup à exploiter qualitativement et quantitativement sur la Seconde Guerre Mondiale, espérons avoir aussi encore des films de ce genre en parallèle des grandes batailles qui trouvent encore place à l'écran.

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Jeu Avr 08, 2021 1:12 pm
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Message Dans un monde meilleurs nous auriont tous les pieds plats.
Le genre ,par son sujet, la guerre, met à nu tout l'ensemble des émotions et comportement humains,des plus sordides au plus émouvant,dans le pire environnement possible, le résultat peut donc être particulièrement puissant et les approches variés,et,ouais, il y as des putain de chefs-d'oeuvre.

Par contre,j'aurai tendance à trouver que la seconde guerre mondiale(et plus récemment,le Vietnam,bien sur) écrase un peu les autres conflits au cinéma,
c'est en soi compréhensible vu son ampleur, mais aussi parce que tant de réalisateurs et d'acteurs de la meilleurs époque s'y sont frottés, mais ,par exemple,mème si Fuller (Et Ford à fait un documentaire il me semble,non?) et quelques autres l'on aborder,une guerre titanesque comme la Corée me semble plutôt ignorer,mème si j'en ignore certainement beaucoup de films.

J’apprécie perso les variations d'époque comme le Zoulou de Endfield ,avec le grand Michael Caine justement,mais aussi le solide Stanley Baker,un habitué des rôles de soldat,trop tôt disparu.

J'ai pas de sensibilité particulière pour l'approche,du patriotique façon Sergent York(pur film de propagande,mais réussi je trouve) ou Iwo Jima ou Strategic Air Command (plus publicité commandé par Curtis Le may que véritable film de guerre,mais bien fait et un Jimmy forcement à sa place)

du spectaculaire/film d'action facon Black hawk down,du mystique facon Apocalypse now (oui,je le trouve mystique) ou de l'anti guerre comme Johnny got his gun (un calvaire à voir,mais une réussite)

Du coté de chez de la vieille Europe outre bien sur les classiques anglais des années 60,des réussites comme,Das Boot,la 317e Section, ou meme le plus récent Capitaine Conan (meme si je grince toujours des dents quant je vois Un P38 soudain apparaitre!)

La encore j'en oublie plein et j'ai tellement à en découvrir!

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Jeu Avr 08, 2021 6:45 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Sur la Première Guerre Mondiale, sorti du nécessaire Les Sentiers de la Gloire et du très réussi 1917..vous avez d'autres titres à conseiller ?

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Jeu Avr 08, 2021 7:46 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Les Croix de bois et La Grande Illusion.

Tous deux français et de l'entre-deux-guerres.


Jeu Avr 08, 2021 8:54 pm
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Buffalo Kasso
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Moody a écrit:
Un classique, au sein d'un genre qui propose autant de visions macro que micro de la WWII. Avec L'Aigle s'est envolé, Les 12 salopards, Les canons de Navarone ou encore De l'or pour les braves...ces bons films cultes qui se focalisent sur une mission en particulier à base de soldats nerveux et charismatiques qu'ils soient alliés ou de l'axe d'ailleurs. Toujours un plaisir de les redécouvrir, pour ces vieilles bobines qui y trainent en effet, les rythmes percutant et des scènes mémorables. Il y a encore certainement beaucoup à exploiter qualitativement et quantitativement sur la Seconde Guerre Mondiale, espérons avoir aussi encore des films de ce genre en parallèle des grandes batailles qui trouvent encore place à l'écran.


Ce qui me rappelle que je n'ai toujours pas vu Les Canons De Navarone! Une performance quand on pense au nombre de fois où il a été diffusé à la télé. :mrgreen:

CHARLTON HESTON a écrit:
Le genre ,par son sujet, la guerre, met à nu tout l'ensemble des émotions et comportement humains,des plus sordides au plus émouvant,dans le pire environnement possible, le résultat peut donc être particulièrement puissant et les approches variés,et,ouais, il y as des putain de chefs-d'oeuvre.
Par contre,j'aurai tendance à trouver que la seconde guerre mondiale(et plus récemment,le Vietnam,bien sur) écrase un peu les autres conflits au cinéma,
c'est en soi compréhensible vu son ampleur, mais aussi parce que tant de réalisateurs et d'acteurs de la meilleurs époque s'y sont frottés, mais ,par exemple,mème si Fuller (Et Ford à fait un documentaire il me semble,non?) et quelques autres l'on aborder,une guerre titanesque comme la Corée me semble plutôt ignorer,mème si j'en ignore certainement beaucoup de films.


J'imagine que tu le connais déjà, mais sur la Corée, tu as le très bon Steel Helmet de Fuller, justement. Connu également sous le titre français super subtil de J'Ai Vécu L'Enfer De Corée.
Tu as un papier dessus sur Louvreuse, d'ailleurs.

La Corée, l'autre pays du carnage

CHARLTON HESTON a écrit:
J’apprécie perso les variations d'époque comme le Zoulou de Endfield ,avec le grand Michael Caine justement,mais aussi le solide Stanley Baker,un habitué des rôles de soldat,trop tôt disparu.

J'ai pas de sensibilité particulière pour l'approche,du patriotique façon Sergent York(pur film de propagande,mais réussi je trouve) ou Iwo Jima ou Strategic Air Command (plus publicité commandé par Curtis Le may que véritable film de guerre,mais bien fait et un Jimmy forcement à sa place)
du spectaculaire/film d'action facon Black hawk down,du mystique facon Apocalypse now (oui,je le trouve mystique) ou de l'anti guerre comme Johnny got his gun (un calvaire à voir,mais une réussite)

Du coté de chez de la vieille Europe outre bien sur les classiques anglais des années 60,des réussites comme,Das Boot,la 317e Section, ou meme le plus récent Capitaine Conan (meme si je grince toujours des dents quant je vois Un P38 soudain apparaitre!)
La encore j'en oublie plein et j'ai tellement à en découvrir!


Oui, je te suis complètement: le topic ne sera certainement pas limité aux deux conflits mondiaux ou au Viet Nam. Y a largement d'autres pistes à explorer.
Je compte d'ailleurs sur les exilés du forum mad pour nous balancer des petites bombes méconnues!

Moody a écrit:
Sur la Première Guerre Mondiale, sorti du nécessaire Les Sentiers de la Gloire et du très réussi 1917..vous avez d'autres titres à conseiller ?


C'est pas vraiment un film de guerre, mais j'ai envie de te dire que Au Revoir Là-Haut se penche sur les conséquences de ce conflit et le fait avec autant d'intelligence que de sensibilité.

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Jeu Avr 08, 2021 9:41 pm
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Inscription: Sam Juin 03, 2006 9:41 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Merci pour ces propositions, le cinéma français ça m'a fait repenser à Joyeux Noêl (pas un super souvenir) et à Un long dimanche de fiançailles (c'est déjà mieux) également.

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Jeu Avr 08, 2021 9:43 pm
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JarJar
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Un genre aussi que je connais à peine, surtout les classique et quelques films cultes. Mais c'est un genre que j'ai toujours du mal à aprécier peut être parce que les séquences sur les stratégie j'y comprend rien :mrgreen: et quand on est sur le terrain on a du mal à s'attacher à un persos. Je n'ai jamais réussi à regarder en entier le Jour le plus long. Ducoup ceux que j'adore du genre n'en sont pas vraiment:
Apocalypse Now, Quand les aigles attaquent, Inglorious Basterds, La Grand évasion, Les 12 salopards, le Soldat Ryan, Paris brûle t'il. et même ces 2 derniers derniers j'ai mis du temps à les apprécier pleinement.

Par contre, j'adore les film de commandos, il faut que je vois de l'Or pour les braves. Si vous avez des bons titres.

Moi j'en ai vu un pourri dernièrement de Nicolas Ray Les Diables de Guadalcanal de 1951.
Entre des stock shot insérés merdiquement, une histoire banal de conflit d'autorité entre John Wayne et Robert Ryan, aucune scéne de bataille n'est mémorables, on a l'imppression que tout le monde s'en fout dans ce film. Seule une très touchante scéne où Wayne rentre chez lui en permission dans sa famille détonne du reste. Sinon belle daube
1/6


Jeu Avr 08, 2021 11:50 pm
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Buffalo Kasso
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Inscription: Sam Juin 03, 2006 3:14 am
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Localisation: J'essaie d'arrêter
Message Re: A la guerre comme à la guerre
Ed Wood a écrit:
Un genre aussi que je connais à peine, surtout les classique et quelques films cultes. Mais c'est un genre que j'ai toujours du mal à aprécier peut être parce que les séquences sur les stratégie j'y comprend rien :mrgreen: et quand on est sur le terrain on a du mal à s'attacher à un persos. Je n'ai jamais réussi à regarder en entier le Jour le plus long. Ducoup ceux que j'adore du genre n'en sont pas vraiment:
Apocalypse Now, Quand les aigles attaquent, Inglorious Basterds, La Grand évasion, Les 12 salopards, le Soldat Ryan, Paris brûle t'il. et même ces 2 derniers derniers j'ai mis du temps à les apprécier pleinement.

Par contre, j'adore les film de commandos, il faut que je vois de l'Or pour les braves. Si vous avez des bons titres.

Moi j'en ai vu un pourri dernièrement de Nicolas Ray Les Diables de Guadalcanal de 1951.
Entre des stock shot insérés merdiquement, une histoire banal de conflit d'autorité entre John Wayne et Robert Ryan, aucune scéne de bataille n'est mémorables, on a l'imppression que tout le monde s'en fout dans ce film. Seule une très touchante scéne où Wayne rentre chez lui en permission dans sa famille détonne du reste. Sinon belle daube
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Ah ah, oui, cette tannée. Je me rappelle, je l'ai vu il y a quelques années et je l'avais trouvé franchement pas terrible.

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Flying Leathernecks / Les Diables de Guadalcanal. Nicholas Ray. 1951.
Ray à la mise en scène d'un film de guerre focalisé sur une unité de l'USAF pendant la guerre du Pacifique et avec rien moins que les deux géants (au propre comme au figuré) John Wayne et Robert Ryan en tête d'affiche, avouez qu'on a déjà vu des concepts moins accrocheurs.
Et pourtant, c'est la déception qui est au bout de la ligne. Pas de quoi passer devant la cour martiale, non, mais entre un script boiteux (voire même cul-de-jatte) et des stocks-shots utilisés jusqu'à la nausée, il ne reste plus vraiment grand chose sur lequel reposer notre attention. Quant à cette confrontation entre deux visions de la guerre et la façon de la mener, elle ne mène qu'à un pet de mouche: Wayne fronce les sourcils, Ryan serre les poings... et rien ne se passe (à ce titre, l'affiche du film est assez honnête: on est au taquet de l'action, là)
De Ray, on préfèrera sans hésiter l'excellent - et dans un tout autre style - A Lonely Place, réalisé l'année précédente avec un Bogart en pleine forme. La différence de qualité en est même assez effarante.

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Ven Avr 09, 2021 8:10 am
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Buffalo Kasso
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Contribution du jour!

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The Monuments Men. George Clooney. 2014.

On connaît tous le penchant du Clooney metteur en scène pour une époque un peu révolue, pour cette Amérique de papa (voire de grand-papy) qui était encore capable d'affronter ses démons bien réels et de les vaincre en s'appuyant sur les valeurs qui ont fait sa grandeur.
Truth, Justice and The American Way, quoi.
A cette tendance avouée au vintage répond - logiquement a-t-on envie de dire - le classicisme de la réalisation de Clooney, dans le sens le plus respectable du terme.

Et avant de lancer le film, il semble que The Monuments Men s'inscrit parfaitement dans cette double perspective: raconter l'histoire d'hommes défendant avec dignité une cause incarnant ce que l'homme peut produire de meilleur, ça le connaît, le beau Georges. Si besoin est, il suffit de revoir le somptueux Good Night And Good Luck pour s'en convaincre.

Mais alors, pourquoi ne se sent-on jamais porté par ce récit? Pourquoi cet intéressant aspect de la Grande Histoire tombe-t-il complètement à plat? Pourquoi ne frissonne-t-on pas un instant pour les protagonistes, même lorsque certains de ceux-ci paient le prix fort?

Plusieurs facteurs rentrent en ligne de compte.
Le visible manque d'implication des acteurs, déjà. Damon semble s'emmerder ferme, Blanchett est à côté de son jeu pendant toutes ses scènes et ne parlons même pas de Bill Murray, dont le visage hurle silencieusement et en boucle "J'EN. AI. RIEN. A. FOUTRE."
Il n'y a qu'à regarder l'affiche, merde: on croirait une photo prise au cours d'une séance de team building dans un cabinet d'expert-comptables (je parviens pas à me remettre de la tronche de Damon, on croirait qu'il pose pour un poster d'un dessin animé Dreamworks, bordel).
Gros souci au niveau du script également: la construction dramatique laisse à désirer et la gestion de l'espace comme de la temporalité est clairement loupée. On ne sait plus vraiment qui fait quoi et qui se trouve où à quel moment. Mais les équipes sont tellement interchangeables que ça ne change pas grand chose à la limonade: l'implication du spectateur ne souffre pas car elle n'a jamais été vraiment présente.
Tout ça est enrobé dans un indéfinissable sentiment de "cheap" qui habite le film du début à la fin.

Même si l'intégrité de Clooney est inattaquable, même si sa sincérité saute aux yeux, cela ne change pas grand chose au fait que les authentiques Monuments Men méritaient mieux.

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- Et c'est là qu'on trouvera les capsules de café Nespresso.
- Parfait. Messieurs, synchronisation des montres.

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Ven Avr 09, 2021 12:52 pm
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Buffalo Kasso
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Allez, ça faisait longtemps...

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1917. Sam Mendes. 2019.

La parenthèse James Bond s’est donc fermée pour Mendes, avec un bilan en demi-teinte : de l’acceptable tendance sympa avec Skyfall et du brouillon à la finition laissée à un SAV de branleurs avec Spectre.
Quatre années de digestion plus tard (le brocoli, ça donne des gaz à pas mal de gens), Mendes se dit qu'il est peut-être temps de se relancer. Et à tout prendre, autant faire preuve d’ambition : il se décide donc à nous sortir son petit Il Faut Sauver Le Soldat Ryan rien qu’à lui.
Enfin, à lui et à son comparse Deakins, évidemment. D’ailleurs, assez curieux de connaître le mot d’excuse que la maman de ce dernier a bien pu envoyer à Villeneuve, tiens.
Toujours est-il que cela valait le coup: oscar de la meilleure photo pour Deakins (pas le premier et, prenons les paris, pas le dernier) et probablement le meilleur film de la carrière de Mendes.
Ou du moins, le film où on a le moins l’impression qu’il se regarde filmer.

Bien sûr, il y a l’argument à la fois technique, artistique ET narratif du « film en un seul plan séquence » qui pourrait éventuellement nous pousser à envisager que Mendes s’est d’abord attardé à un exercice de style avant toute autre considération.
Cependant, cela serait un jugement bien trop hâtif.
Parce que d’une part c’est factuellement faux, déjà : même sans prendre en compte les nombreuses astuces techniques pour organiquement lier les plans les uns aux autres et ainsi donner l’impression d’un unique plan séquence là où il n’en existe pas, le film se divise en deux parties bien distinctes séparées par la phase de perte de conscience du protagoniste.
Procédé dont Mendes tire d’ailleurs le meilleur parti en terme atmosphérique, la tonalité du film changeant radicalement avant et après la « pause ».
Bref, prenons l’argument promo pour ce qu’il est : précisément un argument promo.
D’autre part, il nous faut effectivement éviter le procès d’intention parce que pour 1917, Mendes donne enfin le sentiment de mouiller le maillot. De se salir les mains.
Là où même dans Jarhead il ne parvenait jamais à surpasser une certaine préciosité apparemment inhérente à son style, Mendes prend cette fois une longue inspiration et plonge dans le bourbier tête la première.
Bon, évidemment, on n’est pas dans Croix de Fer, Johnny Got His Gun ou encore dans Come And See. Rêvons pas trop non plus.
Mais sans atteindre les sommets du genre cités à l’instant, Mendes sait alterner moments d’angoisse diffuse (exemple tout trouvé : la traversée des tranchées) et immersion dans un cauchemar éveillé (tout le passage dans le village occupé semble une incursion en enfer, au premier sens du terme).
Il nous ballote entre post-apo et pré-apo : après tout, la mission des protagonistes est de traverser les reliefs d’un massacre afin d’empêcher un carnage.
Il arrive même à nous surprendre au détour de deux séquences particulièrement réussies.

ATTENTION SPOILERS

La première est un moment non de contemplation, mais de respiration : le chant du soldat devant la troupe attendant d’être appelée pour l’offensive. Oraison funèbre entonnée à leurs propres personnes, distillat de regrets, de fatalité, de crainte mais aussi d’espoir et de vie, ce passage touche presque au surnaturel : le protagoniste a traversé les enfers, s’est laissé emporter par un cours d’eau (qui a induit en lui un certain oubli, tel le Lethé) pour mieux arriver dans un immense jardin d’arbres en fleur abritant des guerriers héroïques (les Champs Elysées ne sont pas loin).
La seconde scène est encore plus marquante et constitue le climax le plus adéquat face à tout le parcours du héros : la course éperdue de celui-ci vers la tente de l’état-major qui abrite le destinataire de son message.
Le protagoniste brise alors tous les carcans qui l’ont enserré au cours de sa mission.
Au niveau de la scénographie : il se déplace ainsi à contre-courant de la marée humaine. Alors que la première vague part à l’assaut, le soldat coupe ce mouvement de manière transversale et nous apparaît alors à l’image comme singularisé, transfiguré. Il n’est plus le messager, il est le message.
Au niveau de la hiérarchie : il transcende son statut de volontaire, de chair à canon presque, et va imposer sa volonté de rupture de combat à des officier rendus fous par le goût du sang (surtout lorsqu’il ne s’agit pas du leur).
Au niveau de son intégrité physique : en abandonnant le relatif abri de la tranchée, il quitte son dernier semblant de sécurité et mise tout ce qu’il a sur une mobilité accrue.
Enfin et surtout, au niveau métaphysique, il s’inscrit en rupture avec ce qui semble être l’avenir funeste de tous ceux qui l’entourent (lui y compris) et par son geste entend reprendre en main le fil de son existence et de la leur.
Il s’agit là ni plus ni moins que d’un immense « NON » hurlé à la face du destin, qui se voit pour une fois forcé de baisser les yeux.
Que Mendes ait été capable de nous balancer deux passages aussi réussis, aussi cinématographiques lui assure notre plus grande attention pour son prochain projet.


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Quand j'étais sur la route, toute la sainte journée...

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Mer Fév 16, 2022 5:56 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Non, ce topic ne sombrera pas dans l'oubli!

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Fury. David Ayer. 2014.

Il a eu son petit succès celui-là. Public comme critique, d’ailleurs.
Du coup, on est forcément un peu curieux et ce, sans même tenir compte de la présence de Brad Pitt en lead.
Puis on lance le film.
C’est alors que le pedigree du réalisateur nous revient douloureusement en mémoire : Ayer ? Attendez, le gars derrière les scripts de Fast And Furious et de S.W.A.T. ? Qui a mis en scène les naufrages Suicide Squad et Bright ?
Le même Ayer dont le sujet de prédilection est avant toute chose la culture de la rue de L.A., que cela soit côté flic ou côté gang?
Cet Ayer-là?
Ah. Ok.
Et combien de temps ça dure, Fury, déjà ? 135 minutes ?
Hm. Bien.

Il faut croire que contrairement au Soldat Ryan, personne ne va venir nous sauver.
En effet, que cela soit de par le contexte (la Seconde Guerre Mondiale, derrière les lignes ennemies), les protagonistes (une petite équipe blanchie sous le harnais commandée par une figure charismatique), le référent du spectateur (l' "innocent" du groupe, qui va d'ailleurs rapidement perdre sa naïveté), le dénouement (très peu s'en sortiront au final), le chef d’œuvre de Spielberg est clairement un des modèles vers lequel le film d’Ayer aimerait tendre, sans bien entendu jamais s’en approcher, ne fût-ce que vaguement.

Premier souci: pour réussir un film s'inscrivant dans le genre "men on a mission", il faut - et c'est stupéfiant de devoir le préciser - une mission. Or, si l'objectif des hommes de Tom Hanks est clairement identifié (après tout, ça n'est jamais que le titre du film), on ne connaît jamais exactement celui de l'équipe de Brad Pitt: les péripéties se suivent en mode random, sans liant, sans ligne de causalité, sans trame narrative fluide ou cohérente. En terme de dramaturgie, c'est l'équivalent d'une poule sans tête.

Face à cette absence d'enjeu, le spectateur doit trouver un autre socle sur lequel fonder son intérêt. Et c'est bien là le second souci: cet point d'ancrage n'existe pas. L'implication émotionnelle ne se fait jamais, la faute à un script qui bafouille ses personnages plutôt qu'il les construit.
Finalement, même si on a quelque part envie de saluer l'initiative (Ayer sort ici de sa zone de confort), la tendance du film à se croire plus beau et plus profond qu'il l'est n'aboutit qu'à nous agacer.


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- Alors, c'est quoi la suite du script? Qu'est-ce qu'on tourne comme scène, là?
- Hein? Bin... Je pensais que c'était toi qui le savais, ça!
- ...
- ...

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Ven Oct 14, 2022 3:15 pm
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Buffalo Kasso
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
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The Hurt Locker / Démineurs. Kathryn Bigelow. 2008.

En terme de ratio argent investi / nombre de récompenses obtenues à différents festivals de cinéma, on ne doit pas être loin d’un certain record, là.
Jugez plutôt : d’un côté, un peu plus de 14 millions de budget (ce qui, toutes proportions gardées, n’est pas tellement à ce niveau de production) ; de l’autre, 90 prix glanés dans des cérémonies toutes plus prestigieuses les unes que les autres, y compris – excusez du peu - le premier oscar de meilleur film décerné à un métrage réalisé par une femme, la dure à cuire Kathryn Bigelow, qui empoche d’ailleurs l’oscar de meilleure réalisateur par la même occasion (là encore, une première pour une femme).
Et c’est pareil pour la critique institutionnelle : absolument dithyrambique de toutes parts.
Paradoxalement, dans ce genre de circonstances, il est souvent sage de se méfier.
En effet, une unanimité critique (que cela soit en terme positif ou négatif) dans l’accueil d’une œuvre cinématographique en dit régulièrement plus long sur l’époque de sa réception, sur l’air du temps à un moment « T » que sur les réelles qualités intrinsèques (ou le manque de celles-ci) de cette œuvre.
Bref, quand la hype et la poussière sont retombées, que reste-t-il de ce Démineurs ?

Une impression contrastée, en fait. Par moments, Bigelow nous immerge complètement dans la folie et le stress intense d’un théâtre d’opérations caractérisé par une menace asymétrique.
Et il est sans doute là, le gros point fort de ce Démineurs : dans le rendu de cet environnement où tout est potentiellement suspect, au sein duquel le moindre stimulus capté par votre influx nerveux peut également être le dernier. Curieusement, on en vient à penser au Man On Fire de Tony Scott, autre film de guerre (en quelque sorte) mettant lui aussi en scène une surcharge pour les sens potentiellement fatale à ceux qui la laisse les submerger. Surcharge qui, au mieux, change profondément la nature de ceux qui parviennent à temporairement la dompter, souvent sans se rendre compte qu'ils s'en sont en réalité rendus esclaves.
Cette approche, c'est peut-être encore la séquence d’ouverture qui la synthétise le mieux: voilà un modèle d’exposition d’une équipe confrontée à un défi impossible rendu cependant envisageable par l’exercice d’une procédure rigoureuse alliée à un professionnalisme sans faille.
A l'actif du film, citons également la remarquable prestation d’Anthony Mackie, qui éclipse sans trop de soucis celle d’un Renner qui n’arrive jamais à trouver le ton juste (dans un rôle il est vrai assez délicat).

Hélas, toute sincère et techniquement au point qu'elle puisse être, la démarche de Bigelow n'est pas sans écueils.
La suspension d'incrédulité, notamment, se fait régulièrement malmener jusqu'au point de rupture: certes, en terme cinématographique et narratif, le fait de se concentrer sur une petite équipe est assez compréhensible. Néanmoins, la manière dont le trio de protagoniste se comporte dans certaines circonstances nous fait parfois décrocher du fil des événements de par son illogisme ou son manque de respect de notions martiales élémentaires.
C'est ce manque d'inspiration qui coûte à The Hurt Locker sa place au rang des plus grands films de guerre. Il n'en reste pas moins un éminent représentant d'un genre dans lequel il est terriblement difficile de s'illustrer.


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Ven Fév 17, 2023 11:14 am
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Message Je commence à me sentir seul, ici...
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The Enemy Below. Dick Powell. 1957.

Pas besoin d'être spécialement amateur de cinéma pour connaître The Hunt For Red October, devenu dans l'inconscient collectif la référence automatique, le mètre étalon universellement reconnu dès qu'il est question de films de sous-marins (en compétition étroite, voire à égalité avec Das Boot, c'est vrai).
Mais si le film de McTiernan a pu légitimement atteindre ce statut, c'est aussi parce qu'il a su s'inspirer de certaines œuvres tout à fait remarquables l'ayant précédé. Et dans cette catégorie, The Enemy Below fait figure de monument (l'équipage du sous-marin qui chante à l'unisson? Le second entièrement dévoué à son commandant? Cherchez pas, c'est ici).

En effet, le film de Dick Powell ne se contente pas d'être un fleuron du film de sous-marin, il est aussi un film de guerre refusant tout manichéisme et un sacré film de mecs devant faire front face à l'adversité. Bref, un bon film, tout simplement.
Et un bon film, ça commence par des personnages bien écrits, au premier rang desquels figurent évidemment les deux leads.
A notre gauche, Mitchum, aussi cool qu'un banc de méduses, tient la barre de son Destroyer avec compétence et fermeté. A notre droite, Curd Jürgens, au jeu incroyablement pénétrant, dirige son sous-marin d'une main certes désabusée, mais encore redoutablement sûre.
Deux hommes intelligents, charismatiques, respectés par leur équipage et surtout, extrêmement professionnels.
Deux hommes touchés personnellement par la guerre (Murrell/Mitchum a perdu sa femme lors d'une attaque, Von Stolberg/Jürgens a vu ses deux fils emportés par le conflit) mais suffisamment lucides pour ne pas laisser ces drames obscurcir leur jugement.
Deux stratèges qui, sans jamais cesser de vouloir accomplir leur mission, en viendront vite à sincèrement respecter et même admirer le talent dont son adversaire fait preuve (le petit sourire de Mitchum lorsque son expert radio diffuse sur le haut-parleur central le chant patriotique provenant du sous-marin vaut de l'or).

Là tient précisément un des grands mérites de cet Enemy Below: alors que la seconde guerre mondiale est encore dans toutes les mémoires (on est jamais qu'en 1957 au moment où le film sort sur les écrans), Powell évite de montrer les allemands comme des monstres sanguinaires. Au contraire, le commandant Von Stolberg est dépeint comme ne pouvant pas encadrer le régime pour lequel il travaille: il méprise ainsi ouvertement un de ses subordonnés présenté comme un nazi enthousiaste.
Cette humanisation de l'adversaire est habilement soulignée par un montage à l'équilibre parfait: les différentes phases de combat entre les deux bâtiments sont ainsi vécues aussi bien par le prisme du destroyer que par celui du U-Boat.
Et bien souvent, les réactions des deux équipages sont troublantes de similarité: ainsi, lorsque le jeu du chat et de la souris connaît une pause au cours de laquelle chacun des deux adversaires fait le mort, nous observons les matelots des deux camps passer le temps de la même manière (jeu de stratégie, lecture) et faire preuve de la même angoisse par rapport à "l'autre".

Autre point fort, Powell bénéficie de l'appui de la Marine Américaine pour son tournage et ça se voit: les explosions des bombes sous-marines catapultées par le destroyer restent encore extrêmement impressionnantes aujourd'hui.

Il vous faut une preuve ultime de son immense intérêt? Très bien: apprenez que The Enemy Below ne passe pas le test de bechdel. Ce qui, comme toute personne de bon sens le sait, équivaut quasiment à un label d'excellente qualité.

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- Bon, maintenant que tout ça est derrière nous, un verre?
- Un verre.

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Ven Mar 17, 2023 12:32 am
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Message Vamos a la playa
Dunkirk de Christopher Nolan (2017)

Mai 1940, pendant que les restes de l'armée française se battent comme des lions pour tenter de ralentir la déferlante allemande les anglais attendent les bateaux qui doivent les ramener en Angleterre sur une plage.

Et Christopher Nolan, plutôt que de nous montrer les féroces combats maison par maison, soldats contre tanks, décide de rester sur cette foutue plage et le seul personnage français que l'on aperçoit plus de 5 secondes est un lâche doublé d'un abruti!

Cela avait causé un peu de grabuge en son temps, à très juste titre mais il me semble qu'on peut voir un hommage à nos gars quand le chef anglais annonce, une fois l'évacuation des boys accomplie, qu'il veut rester pour les français. Les soldats qu'on peut apercevoir au début ont l'air bourrus mais braves, je me suis repassé la scène à la fin du film tellement j'étais frustré.

On y perd quand même grave en action, les soldats anglais sont impuissants et se font laminer par des raids aériens et sous marins à intervalles régulières. Quelques avions anglais assurent quand même un peu de défense et nous offrent les meilleurs moments du film avec des plans aériens vraiment impressionnants par leur profondeur, j'avais peur que Nolan foire les scènes d'action comme c'est pas trop son fort mais là il a assuré.

Bon allez 3,5/6, le film est bien mais mérite quand même une pénalité pour n'avoir pas filmé les combats en ville, ce qui se passe côté anglais on aurait pu le condenser en 20 minutes hein voilà dommage.

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Jeu Avr 20, 2023 11:08 pm
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Citation:
On y perd quand même grave en action, les soldats anglais sont impuissants et se font laminer par des raids aériens et sous marins à intervalles régulières.


Et donc exactement ce qui s'y est passé, en fait.
Pour le fait de presque rester cantonné à la plage, c'est clairement pour illustrer et renforcer l'immersion.
Faut réaliser ce que ça devait être que ce moment de la guerre, particulier, frustrant et mortel.
Pas de combats de rue parce que justement, le tout était de les contenir coincés, retraite impossible.
Les allemands avaient disposés des moyens pour éviter un retour par les routes, s'y confronter était du suicide.
On en devine un peu la menace au début, introduction suffisante pour expliquer que tout se jouera sur le sable.
Et que le pire ennemi de cette "bataille", c'était l'attente.
Un peu comme attendre que le bateau arrive quand le Vésuve crache ses poumons en amont.

Au delà de ça, le film semblait pour les spectateurs déstabiliser dans son écriture alors que le scénario sied parfaitement à cette histoire de l'Histoire. Et si le fond est donc à la hauteur, la forme n'est pas en reste avec ces dogfights en cockpit qui peuvent faire jalouser tout Top Gun 2 qui ne pas donner l'immersion de cockpit que l'on veut en suivant ces escarmouches, ne sachant pas placer une caméra au bon endroit. Chez Nolan c'est classique mais putain d'efficace, on y est.

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Sam Avr 22, 2023 10:37 am
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Message Re: A la guerre comme à la guerre
Ah tiens, c'est marrant, c'était justement le film suivant dont je voulais parler ici.
Allons-y, donc.

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Dunkirk. Christopher Nolan. 2017.

Dans le numéro de mars 2017 du magazine Première, Emma Thomas, épouse de Christopher Nolan et productrice d’un grand nombre des projets de ce dernier (et également productrice de certains films de Zack Snyder, ce qui vous dit tout ce que vous avez besoin de savoir sur son flair professionnel), a tenu les propos suivants : « Il y a quelques années, je suis tombée sur un livre de témoignages sur Dunkerque. Je l'ai fait lire à Christopher et il a tout de suite vu ce qu’il pouvait en tirer. À part l’incroyable plan-séquence de Reviens-moi, cette histoire n’a jamais été racontée de façon moderne. »
Si par « de façon moderne », elle entendait « par mon mari », alors d’accord. Sinon, on se contentera de secouer la tête avec incrédulité devant l’outrecuidance insensée d’une telle déclaration.

Mais à part l’occasion pour Mme Thomas de dire n’importe quoi, que nous apporte ce Dunkirk ?
Comment l’appréhender au regard du reste de la filmographie de Nolan ?
Quand le réalisateur le plus surestimé actuellement se lance dans un film de guerre, ça donne quoi ? On veut dire, à part trois oscars et plus d’un demi milliards de recette au box-office mondial, bien entendu.
Hé bien déjà, ça nous balance une preuve supplémentaire que Nolan est rigoureusement incapable de s'empêcher d'inutilement compliquer une histoire pourtant simple.
Comment? Via un artifice de montage cherchant vainement à donner un cachet de sophistication à une histoire qu'on a déjà vu bien plus efficacement racontée ailleurs (dans le chef d’œuvre de Verneuil Week-End A Zuydcoote, par exemple). Par-là même, Nolan confirme une fois encore la confusion (intrinsèquement liée à son approche du cinéma) qu’il entretient entre complexité et profondeur.

Ceci étant dit, une fois dépassée cette irritante manie, il faut reconnaître ce qui est : Dunkirk a été conçu avec sérieux et sincérité. On y notera un casting solide et visiblement impliqué : à ce titre, la prestation de Branagh ne passe pas inaperçue et nous rappelle que l’homme a du talent (du moins, quand il n’est pas occupé à le dissiper dans des productions hollywoodiennes sans intérêt). Même Harry Styles rend une copie correcte, c'est dire.
Autre point positif: pour une fois, Nolan a su maîtriser la durée de son film, lui qui ne parvient habituellement pas à articuler son propos en moins de deux heures. Conséquence appréciable: le sentiment d'urgence et l'oppressement inhérents au sujet y gagnent en intensité. Sur ce plan, l'apport de Hans Zimmer en terme atmosphérique est indéniable et fournit bien plus qu'une béquille narrative pour traduire cette notion de désastre imminent.
Bref, à voir. Sans crier au génie, mais à voir.


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Zimmer et le casting tentant de sauver le sens de la narration de Nolan, une allégorie.

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Sam Avr 22, 2023 10:46 pm
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Message Perfide Albion!
Moody a écrit:
Citation:
On y perd quand même grave en action, les soldats anglais sont impuissants et se font laminer par des raids aériens et sous marins à intervalles régulières.



Pas de combats de rue parce que justement, le tout était de les contenir coincés, retraite impossible.


Ha ben si y'a des combats de rue avec les français, quelques moments de bravoure genre telle maison qui a tenu tant d'heures face au déluge allemand. Mais évidemment la fuite anglaise est moins héroïque si on raconte ça. Enfin bon la petite dédicace du grand Yaka rosbif à la fin c'est déjà un énorme progrès par rapport à la manière dont les anglais ont l'habitude de raconter cette histoire. Le "bon voyage" lancé par un francais au soldat anglais au début aussi, on se doute que lui il a pas prévu de voyager.

Petit rappel historique quand même

Citation:
La retraite des troupes britanniques en vue de leur évacuation du territoire français entraîne l'encerclement de ces dernières et de nombreuses unités françaises à Dunkerque. Les troupes françaises mènent alors une résistance héroïque et désespérée, en particulier la 12e division d'infanterie motorisée à partir du fort des Dunes, destinée à gagner un laps de temps nécessaire à l'embarquement de l'essentiel des troupes britanniques et de plusieurs unités françaises et belges vers le Royaume-Uni, aidées par l'indécision d'Adolf Hitler qui confirma un ordre d'arrêt (Haltbefehl) du général von Rundstedt des armées allemandes devant Dunkerque.



Petit rappel aussi que c'est les français qui ont gagné la réputation d'être des lâches durant cette guerre et que les anglais ne sont pas les derniers à oser se moquer alors qu'en vérité :


Citation:
L'état-major français désormais dirigé par le général français Weygand misait sur une contre-attaque qui permettrait de se dégager vers le sud. Mais le chef du corps expéditionnaire britannique, le général Gort, préfère évacuer ses positions et sans prévenir ni le gouvernement britannique ni ses alliés, il fait retraite vers les ports de la Manche. Le lendemain, le cabinet de guerre britannique, mis devant le fait accompli, confirme cette décision unilatérale, mais toujours sans prévenir ses alliés


Un film historiquement honnête serait dévastateur pour les anglais

Citation:
Bien informée, la propagande allemande annonce à la radio que « les Anglais se battront jusqu'au dernier Français » et abandonnent les Français : l'effet est dévastateur et Churchill, très conscient du risque politique que cela représente, intervient, lors d'une réunion, le 31 mai à Paris, pour ordonner que l'on procède de façon égale pour les deux troupes et pour que les Britanniques forment l'arrière-garde. Cependant, il n'en sera rien et 35 000 soldats français se battront jusqu'au 4 juin au matin pour permettre l'évacuation dans la nuit des derniers bateaux pour Douvres.



Enfin bon voilà hein, c'est juste dommage que nos producteurs soient trop nazes pour monter ce genre de projet, y'aurait vraiment un super film à faire .

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Dim Avr 23, 2023 2:30 pm
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