
La Chute de la Maison Husher (Netflix - 2023)

Après le semi échec "
Midnight Club",
Mike Flanagan revient sur Netflix avec l'ambitieux projet d'adapter rien moins que la nouvelle la plus populaire de
Poe. Projet alléchant mais casse gueule, encore plus quand on a appris qu'il allait en donner une version moderne.
Roderick Usher devient donc un magnat d'un empire pharmaceutique, riche industriel sans foi ni loi qui sacrifie tout principe sur l'autel de l'argent et du pouvoir. Traqué par un procureur tenace du nom de
Auguste Dupin (*wink wink*), le voilà mis sous la pression d'un mystérieux témoin que posséderait l'accusation et capable de le faire tomber. Pendant que le clan Usher se déchire pour tenter de trouver la taupe, les enfants de la famille meurent tous les uns après les autres.
On attendait une adaptation de "
La Chute de la Maison Usher" et finalement,
Flanagan nous sort un gloubiboulga indigeste de toutes les oeuvres de l'auteur. Reprenant une structure similaire à sa précédente série (l'anthologie déguisée... et quand on y pense, c'est déjà ce qu'il avait plus ou moins fait sur
Hill House), le réalisateur tente donc un toutéliage bordélique, essayant tant bien que mal d'assembler toutes les nouvelles de
Poe en un tout cohérent... ce qu'il ne parviendra jamais à faire vraiment. La série passe donc son temps à faire des coups de coude pas très subtil, le jeu consistant à reconnaître quel élément issu des écrits de l'auteur est adapté dans tel épisode. Le tout ressemble surtout à un jeu de massacre grand guignolesque plus proche d'un
Destination Finale que de ce bon vieux
Edgar Allan. Le seul "segment" à peu près correct, c'est le tout premier, "
Le Masque de le Mort Rouge", même si
Flanagan n'est pas un grand esthète et que ça manque de baroque et d'extravagance. Mais l'apparition de la mort masquée sur le "
Me & You" de
Madeaux est le seul moment de la série qui me soit resté en mémoire.
Mais si
Flanagan échoue dans les grandes largeurs, c'est surtout parce qu'il se lance dans un exercice qu'il ne maîtrise pas. Cette version moderne décide de partir dans la direction d'un "
Succession" horrifique. Or, c'est un genre qui demande un ton précis, une ironie, un cynisme, un humour noir qui est presque l'antithèse même de ce que
Flanagan a pu montrer jusqu'ici. Avoir des personnages à la morale flexible et douteuse, pourquoi pas, mais il faut en faire des salopards qu'on adorera détester. Vous ne pouvez pas en faire juste des merdes pitoyables et antipathiques. Dans une série, vous devez au moins vous raccrocher à un personnage. Là, il n'y en a aucun qui soit sympathique ou intéressant. Les morts s'enchaînent dans l'indifférence générale et on ne ressent absolument rien pour aucun d'entre eux, ni peine, ni plaisir.
Le style de
Flanagan est toujours le même, reconnaissable, mais c'est bien ça le problème : il n'est pas compatible avec le ton de la série. Le réalisateur a voulu changer de genre sans changer sa façon de faire. Ainsi, son côté verbeux ressort ici comme jamais mais ce qui était une force autrefois plombe la serie ici. Dans
Hill House ou
Midnight Mass, les longs monologues et les dialogues étaient au service d'un propos pertinent. On y parlait résilience, rapport à la foi, à la mort... Ici, il n'y a rien, la série n'a rien à raconter, si ce n'est une vague métaphore du capitalisme qui mangerait ses enfants et n'aurait aucune considération pour les génération future, prêt à la sacrifier au nom du profit immédiat (et des faveurs des médias...). Sauf que la force de
Flanagan n'a jamais résidé dans un message politisé mais plutôt dans l'aspect dramatique de ses séries, totalement absent ici.
Pire, il fait un contresens total dans la figure de la mort qui traverse la série, ici présentée comme un être surnaturel proche du diable, qui proposerait des pactes et prendrait un certain plaisir à torturer et tuer ces être dénués de principes. Une relecture bien éloignée de l'ambiance gothique de Poe et plus proche de ce qu'est devenu
Jigsaw après le 3e film de la franchise "
Saw"
Flanagan garde même des twists dans sa manche pour les balancer dans le dernier épisode, se pensant plus malin que les autres. Sauf qu'après 7 épisodes pleins de vide et de vagues allusions pas très finaudes, on a déjà plus ou moins compris ce qui s'était tramé et ces révélations n'en sont plus vraiment.
Si
Midnight Club n'était pas une grand réussite, il restait au moins quelques trucs à sauver. Là, c'est la débandade totale. Ça ressemblerait presque à un travail de commande. Et pas un bon.
C'était la dernière collaboration entre
Netflix et
Flanagan. En espérant que son arrivée sur
Amazon et son adaptation de
La Tour Sombre soit meilleure (mais j'ai peine à y croire).